vendredi 11 novembre 2011

MARATHON DE NEW YORK 2011


Recit de Pixie 

Dimanche 6 novembre: 


D day, je vous avais rabâché les oreilles, on y est!

4h30 réveil. Vu que je m’étais couchée et endormie à 20h15 la veille, le réveil n’est pas trop dur. 
Habillage, petit dèj et hop on saute dans les cars qui doivent nous amener à Staten Island avant la fermeture du Verrazano Bridge à 7h .
Commence alors une longue attente de 3 heures, mon départ étant dans la 2eme vague à 10h10. Les gens sont zens, pour la plupart allongés au soleil, il fait 5°C, on distribue café et bonnets…
Quand l’heure approche, j’enlève le surplus de vêtements et me dirige vers mon sas. Je ne suis pas stressée, on y est enfin enfin, après 16 mois d’attente!



Km 0 à 3 Staten Island

Le départ est donné après l‘hymne américain et New York New York chanté par Frank Sinatra… c’est enfin parti pour une longue balade. 
On s’engouffre sur le fameux pont qui offre une vue magnifique sur Manhattan. Mais que ça paraît loin! La cadence est lente, il y a beaucoup de monde et surtout: ils s’arrêtent tous pour prendre des photos! On n’est pas à un safari quand même! L’hélicopter nous survole, les bateaux sont autour du pont, le départ est grandiose, comme on a l’habitude de le voir à la télé.
J’ai l’impression de ne pas avancer et me cale sur deux wonderwoman qui ont comme cape un drapeau américain et qui se frayent un chemin à ma cadence à travers la foule. Je ne me sens pas très bien, j’ai un point de côté qui m’empêche de respirer correctement. Au bout de 2 kilomètres il disparaît pour laisser place à une douleur inconnue au fessier, douleur qui ne me quittera pas de tout le restant du chemin.



Km 3 à 21 Brooklyn


A l‘autre bout du pont (3 km tout de même) à Brooklyn, une foule en liesse nous attend. Ce sera une acclamation sans fin jusqu’au bout. Je me cale sur ma cadence de 5’27 au km. Je passe le ballon 4 heures, mais que fait-il là devant moi?, heureusement que je le laisse derrière moi…
Il fait un temps radieux, j’ai le soleil dans les yeux (ce sera ainsi sur tout le parcours bizarrement, alors qu’on va essentiellement vers le nord…)mais il ne fait pas chaud, entre 6 et 12 degrés. Les gens hurlent à notre passage.
J’entends les premiers français qui crient: allez les bleus. C’est là que c’est marrant d’être déguisé en française, ( maillot bleu blanc rouge avec France écrit en grand, jupette bleu France, maquillage bleu blanc rouge sur les joues, ruban dans les cheveux). Je sais que les « Vive la France » ou « Go France » sont pour MOI.

La douleur à la hanche ne part pas, c’est assez déconcertant. J’essaie de rentrer dans la course, je me sens déjà fatiguée, on en est qu’au début. Mes yeux sont rivés sur ma Garmin (on ne me refera pas), 5’27  au km, c’est ce que je dois faire sur 42 km…mais ça me semble déjà dur, au secours, on en est qu’au début….Les gens commencent à me fatiguer avec leurs cris, je décide d’écouter ma musique pour me mettre dans ma bulle au km8, mais impossible d’entendre quoique ce soit, tellement les spectateurs font du bruit!
C’est là que je rejoins le ballon 3h50...cool. Ils sont marrants, leur pace makers, on ne les voit pas! 5 malheureux ballons à moitié gonflés, ils n’ont pas fière allure comme les nôtres avec leur grande flamme! Ah au moins pour ça ils pourraient prendre exemple sur les meneurs d’allure français! Du coup, vu qu’on ne le voit pas, au bout de 1km je le laisse filer ( mauvaise excuse, je sais!)
J’avance j’avance, passe le km 10 , j’ai un peu de retard avec 55‘45, mais vu que je me donne 9min59 de battement sur mon temps final escompté, ce n‘est pas grave, en tout cas ça ne me stresse pas, je suis sur une base de 3h54 .
Les ravitos sont placés tous les miles, d’abord une rangée de bénévoles qui tendent des gobelets de Gatorade, puis une rangée qui tendent de l’eau, il n‘y a pas de tables, c‘est un mur d‘hommes et de femmes pour faciliter la prise des gobelets. Les spectateurs s’y mettent également et nous proposent des donuts (!) des bananes, du café, il y a des stands improvisés d’eau ou de Coca, tout le monde s’y met! 
Je continue et continue à courir le long des avenues, de temps en temps je tape dans les mains des gens, des enfants surtout. Un groupe de Gospel chante sur les marches d’une église, une grosse dame secoue le drapeau français…mais la hanche me fait mal, les gens me saoûlent à crier comme ça même si j’admire leur ferveur et dévouement pour les marathoniens. 

Km 21 à 25 : Queens
Le semi approche, on quitte Broolyn pour le Queens par le Pont Pulaski. Au moins sur les ponts le calme règne, pas de spectateurs mais ça monte, ça monte ( les déscentes ne servent qu’à rattraper le retard)…et déjà les panneaux nous attendent: Halfway through, welcome to The Queens.
Je passe le semi en 1h57, si je continue comme ça c’est bon… toujours avec 3h54 en ligne de mire…mais je commence à fatiguer sérieusement, je me dis que je m’arrêterai bien là!
Je prends un gel tout les 10km, et m’hydrate souvent, presque à chaque ravito …


Km 25 à 19 : Manhattan

On quitte le Queens par le fameux Queensboro Bridge pour arriver - enfin - dans Manhattan au km 25 … je n’ai jamais fait plus lors de mes sorties longues.
Oui, on peut dire « Le Pont m’a tué », un mastodonte de presque 2km de long.
Tout le monde souffre, il y en a qui jurent, qui gémissent , je sens mes jambes, ça fait mal, ma cadence diminue lentemente mais sûrement, je perds des secondes, des minutes au secours , je ne le sens plus du tout!
Le pont se termine par un virage à 240°, on dirait une sortie de grand huit. Pour nous narguer un immense panneau indique: slow down, sharp curve ahead.
Manahattan nous acueille, la foule est encore plus dense, ils ont des clochettes de vaches, des vuvuzéla,ils hurlent, ils encouragent, ils ont l’air contents, je les hais!
C’est là que la partie la plus horrible commence. Non seulement j’ai mal à la hanche, les jambes commencent à se tétaniser, mais en plus je suis sur la 1st Avenue . Une ligne droite de 7km de faux plat m’attend, c’est cette avenue que tout le monde redoute, on voit les gens courir devant soi en montée sur des kilomètres et kilomètres, ça sape le moral.
Je fixe la ligne bleue j’arrête de regarder autour de moi comme j’aime le faire habituellement. Ne plus penser, juste courir. Je me dis: et si je m’arrête? Personne ne m’oblige à être là…. Je me surprends à ralentir et marcher, marcher(!) sur une vingtaine de pas. Pas possible, je marche, la honte supreme! Et hop je repars. 
Je me mets bien au milieu de la route pour pas être incommodée par ces spectateurs délurés, je ne peux plus les voir, j’aimerai ne plus les entendre, qu’on me fiche la paix. Je passe le Km 30 et c’est toujours tout droit, au moins on n’a pas à réfléchir, mais les jambes tétanisent…
Mon allure diminue et diminue, il y a des moments où j’ai l’impression de faire du sur place (finalement je suis quand même encore à 10km/h).

Km 32 à 34 Bronx

Encore un pont pour faire un passage pour la forme dans le 5ème borough de NY, le Bronx, on y restera juste pour 1 mile, passage sordide, pont horrible, ça ne change pas…



Km 34 à 42,195 Manhattan Central Parc

Rebelote Manhattan, je fais le décompte du calvaire qui me reste à faire. Plus que 5 miles, 5 miles ce n’est rien. Mais si c’est un monde, c’est un peu plus de 8km…
Je ne réfléchis plus, je continue,je vais tout droit, les yeux rivés sur la Garmin, la mort dans l ’âme.J’ai envie d’une pause, d’une longue pause! Je m’arrête à un ravitaillement, (chose que je n’ai encore jamais faite) je perds des secondes, au secours, je recommence à courir, mais qu’est ce que je fais là?

Central Parc approche, la foule devient encore plus dense, je rentre dans le parc, je sais que ce n’est plus très loin. Encore un gel, il m’aidera peut-être à tenir…
Go France Go. Looking good France (ça, je ne le prends pas pour une expression toute faite, non, je le prends pour moi, c’est bon pour mon égo, qu’est ce que j’en chie, mais je suis la plus belle du marathon de New York!)
Allez la France, allez la p’tite française. 
Kilomètre 40, je regarde ma montre, j’y crois encore …Vive la France…taisez vous bon dieu!
J’arrive au bout de Central Parc , je longe la partie sud, ,j‘accélère, l’arrivée est à 400m. C’est seulement là que je comprends que ça ne passera pas. Ma montre indique 3:59 et des brouettes. Même à fond sur la piste je ne sais pas courir 400m en 1 minute (et pour cause, ce serait à 24km/h…). C’est fini. 
Je sprinte tout de même et en passant la ligne d’arrivée je lève les bras , j’ai quand même fini le marathon de New York, merde!
J’arrête le chrono, il indique 4h00 et des secondes de trop.
Je continue à marcher, marcher, marcher on me met la médaille autour du cou, on me félicite et tout ce que j’ai envie de faire est pleurer, pleurer de fatigue et de déception. 
On me choppe pour faire une photo avec la médaille, les larmes coulent, elle sera belle, cette photo, oh oui!
Les bénévoles accourent, les secours également, est-ce que ça va? Are you ok, are you sure, yes yes tout va bien dans le meilleur du monde, je suis juste vexée comme un pou et pour ça personne ne peut m’aider, c’est à moi de ravaler mon amour propre



Avec le recul, d’ici quelques mois, je suis sûre que je dirai comme tout le monde: New York est géant, on y va pour l’ambiance et pas pour faire un temps et c’est le plus beau marathon du monde.
Je termine dans le premier tiers toutes catégories confondues mais pas sous les quatre heures. 

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